Invasion de l’Ukraine: qui applique les sanctions ?
Les « défaillances » n’interpellent pas l’influence de l’Occident mais mettent l’accent sur le fait qu’elles ne sont pas infligées par le Conseil de sécurité
Presse-Net (Beyrouth)
Deux mois après le début de l’offensive russe en Ukraine la Russie serait-elle « plus isolée que jamais » ? Cette affirmation du président américain Joe Biden selon laquelle Vladimir Poutine est « de plus en plus isolé » semble loin de la réalité.
Déjà une partie de la communauté internationale hésité à condamner Moscou de façon directe ou bien s’abstient lors des votes à l’Assemblée générale de l’ONU.
C’est vrai qu’il y a un isolement très net de la Russie du côté du bloc occidental suite aux trains successifs de sanctions qui altèrent les échanges commerciaux et financiers. Mais sur la scène internationale, la situation est complètement différente : de très nombreux pays étant très prudents et refusant de céder aux pressions occidentales.
Il est vrai que l’attaque russe de l’Ukraine le 24 février, a suscité une condamnation immédiate des Européens et des Américains et des condamnations plus tièdes de la part de beaucoup de pays en Afrique et en Amérique latine et même au Moyen-Orient. Il va sans dire que quelques pays soutiennent clairement Moscou (la Syrie, le Venezuela, l’Iran et les pays satellites en Asie Centrale).
Puis l’absence d’effets à court terme des sanctions économiques « sans précédent » sur le conflit en cours n’aide pas non plus à convaincre ces États réticents.
Ces États observent que les sanctions sont dures, mais constatent qu’elles n’empêchent pas Poutine de prolonger son action meurtrière, et de bombarder des villes ou même d’arrêter le siège de Marioupol.
Les dirigeants de ces pays pensent que si l’objectif était de faire pression sur Poutine pour qu’il se retire d’Ukraine, cela n’a clairement pas fonctionné.
Un nombre croissant de pays veulent, à cette occasion, affirmer leur indépendance à l’égard de l’Occident, malgré la nécessité d’une coopération étroite avec ce même Occident.
Parmi ces États nous trouvons l’Inde et l’Afrique du Sud notamment, qui se sont abstenues lors du vote sur un projet de résolution appelant la Russie à se retirer de l’Ukraine.
Pour beaucoup de Pays « condamner l’invasion de l’Ukraine est une chose, lancer une guerre économique contre la Russie en est une autre, et de nombreux pays d’Amérique latine, d’Afrique et d’Asie ne sont pas prêt à franchir ce pas.
De nombreux pays d’Amérique latine le Brésil et le Mexique refusent de participer aux sanctions, également plusieurs pays en Afrique et en Asie qui ont des intérêts à protéger tels que les fournitures d’armement ; le blé ; le maïs etc… ils n’hésitent pas à condamner l’invasion de l’Ukraine, mais ne sont prêts à adopter une position contraire à leurs intérêts.
L’Inde considère que la guerre a imposé un choix malvenu entre l’Occident et la Russie, et voudrait éviter à tout prix être poussés à adopter une position qui hypothéquera l’avenir. Cela étant dit, les États-Unis restent un partenaire essentiel et indispensable dans le cadre de la modernisation de l’Inde, mais il est évident que la Russie est également un important partenaire pour des raisons géopolitiques et militaires
La Chine représente un cas à part, c’est un allié à la Russie même si les grandes banques ont arrêté leurs transactions avec la Moscou, pour éviter les sanctions américaines, mais beaucoup de transactions ont été transférées vers des petites banques de province qui n’ont pas de succursales en Occidents, et le commerce continue.
La pression occidentale a atteint l’UNESCO : Ces derniers mois, des pays occidentaux ont demandé le déplacement de la réunion du Comité du patrimoine, qui devait se tenir en Russie en juin prochain.
Devant le refus de dizaine de pays, un compromis a été trouvé avec l’annonce du report de la réunion annuelle à une date non précisée, ce qui pourrait signifier que la Russie accueillira la réunion une fois l’offensive militaire terminée.
Les mêmes pressions ont été exercées sur le G-20 de la part de Washington, mais l’Indonésie, qui préside cette année, a refusé d’en exclure la Russie au nom de la neutralité.
Cet « défaillances » n’interpellent pas l’influence de l’Occident et en premier lieu les États-Unis, mais mettent l’accent sur la nature des sanctions et le fait qu’elles ne sont pas infligées par le Conseil de sécurité, où la Russie a un droit de veto, et sont un « copié collé » des sanctions américaines extraterritoriales.
Pour beaucoup de pays – malgré des circonstances différentes- l’invasion russe de l’Ukraine rappelle d’autres aventures tel l’invasion de l’Iraq ou de la Serbie qui se sont déroulées hors du cadre du Conseil de sécurité pour cause de droit de veto.